Lettre pastorale de l’Évêque, le 15 juillet 2016
/Chers collègues, chers amis et amies,
Je suis maintenant de retour de mon premier Synode général. J’avais l’honneur d’être
accompagnée par les collègues du Diocèse de Montréal suivants : Mme Valerie Bennett,
Mme Susan Winn, Mme Elodie Lambert, le Révérend Robert Camara et le Révérend
Nicholas Pang. De plus, la Révérende Annie Ittoshat était représentante de la délégation
des Peuples Autochtones (ACIP), la Révérende Dr. Karen Egan participait comme
membre du Conseil général du Synode et représentante du Seminaire Diocésain de
Montréal et la révérende et professeure Patricia Kirkpatrick représentait les
Compagnons du Diocèse de Jérusalem.
Comme vous le savez sans doute, les membres du Synode étaient appelés à voter sur
une résolution qui aurait pour effet d’étendre le sacrement de mariage aux personnes de
même sexe. Alors que nous étions réunis avec incertitude et espoir, cette rencontre du
Synode général a revêtu une bien plus grande signification. En fait, ce fut une rencontre
formidable de délégués, dirigeants et partenaires de l’église Anglicane du Canada,
assortie d’abondantes prières et d’une planification minutieuse. Nous avons demandé
au Seigneur de nous guider et nous avons ensuite médité toute la semaine à partir du
livre d’Ésaïe, chapitre 43, en particulier à partir du thème du Synode, le verset 10, « vous
êtes mes témoins ».
Un autre verset, le 19, a également retenu l’attention, suscitant à la fois inquiétude ou
optimisme : «Voici, que je fais une chose nouvelle, sur le point d’émerger; ne la
reconnaitrez-vous pas ? Je mettrai des chemins dans le désert et des fleuves dans la terre
aride ».
Quand je repense à cette semaine, je crois que le Seigneur était bel et bien au travail, au-dessus
et au-delà de nos agendas individuels ou corporatifs. Je suis revenue avec une
grande compréhension quant à la diversité, aux intérêts et aux problématiques des
membres de notre Église anglicane du Canada, en pensant aussi à l’amour et à la passion
que tous apportent au service de Jésus-Christ.
La présence de plusieurs Anglicans autochtones et Inuits, laïques, membres du clergé et
évêques était aussi très importante pour nous. Un service de traduction simultanée était
disponible pour favoriser la compréhension et la communication. Mark Macdonald,
l’Évêque autochtone au niveau national et Lydia Mamakwa, Évêque autochtone du
Ministère spirituel de Mishamikoweesh, étaient présents, de même que l’Évêque
Barbara Andrews du Territoire du peuple (anciennement connu comme Paroisses
anglicanes de l’Intérieur Central) et l’Évêque Adam Halkett du diocèse de l’Arctique.
Les autochtones présidèrent l’eucharistie le dimanche, un service qui démarra avec une
cérémonie traditionnelle de purification par la fumée de sauge, au son des tambourins et
des chants, comme c’est souvent le cas dans les congrégations autochtones. Les deux
premières lectures ont été faites en langue autochtone avec la traduction anglaise sur
écran. Pendant cet après-midi, nous avons été mis au fait du travail accompli vers l’autodétermination des peuples autochtones et en soirée, l’Évêque Mark nous a conviés
joyeusement à des chants « gospel » animés et la prière. Tout cela était diffusé en
simultané sur l’internet.
Pour favoriser les échanges et discussions, nous étions assis à des tables en petits
groupes avec des gens d’autres diocèses. C’était intéressant (parfois difficile) d’entendre
les points de vue des autres, mais la plupart d’entre nous avons fait l’effort d’écouter
respectueusement les opinions et avis divergents. Nous étions guidés par le
commandement d’aimer notre prochain comme nous-mêmes. On nous a rappelé qu’à
titre de membres d’un seul corps, nous ne pouvons pas dire, «nous n’avons pas besoin
de vous».
En effet, Fred, notre primat, lut une grande portion d’un passage des Corinthiens,
chapitre 12, alors qu’il tenta d’aider le Synode à cheminer dans un état d’esprit
généreux, respectueux et rempli de grâce. C’était un exercice spirituel profond pour
plusieurs d’entre nous, pendant que nous attendions l’Esprit saint en nous interrogeant
sur l’issue de la rencontre.
Au moment du vote sur l’amendement au droit canonique quant au mariage chrétien
entre personnes de même sexe, plus de 70% des délégués se sont prononcés en faveur.
Plusieurs de nos membres LGBTQI de l’église et leurs amis avaient l’espérance que nous
puissions dorénavant les inclure à part entière dans ce sacrement. En même temps,
plusieurs voix importantes se faisaient entendre en espérant et en priant que la
résolution ne passe pas. Nous avions besoin d’une majorité des deux-tiers dans chacun
des chambres soit les évêques, les membres du clergé et les laïques. Comme vous le
savez, il y a eu un problème avec le vote électronique et le résultat négatif qui semblait
avoir été enregistré s’est révélé inexact le lendemain, soit le mardi, ce qui a mené
finalement à un résultat positif. Ce qui s’est produit entre le résultat du lundi soir et
celui qui s’est avéré finalement le mardi pourrait bien avoir une incidence cruciale pour
l’avenir de notre église.
La difficulté d’appartenir à une église où plusieurs pensent différemment les uns des
autres est l’une des choses marquante du Synode général. Nous tous et toutes, chacun et
chacune à notre tour, avons vécu déceptions et agonie quand la décision du Synode fut à
l’opposé de notre volonté. Ce lundi soir, les délégués de Montréal et moi-même étions
assis dans un mutisme et une douleur évidente quand le résultat a été annoncé et que
nos amis LGBTQI, au Synode et en ligne, réagissaient à la nouvelle. Nous étions
conscients de leur douleur et leurs sentiments de rejet. Nous nous demandions comment
l’église pouvait survivre à une si grande blessure.
Ce fut vraiment difficile de prier ce soir-là, et le jour après, et de demeurer en
communauté avec ceux qui avaient voté contre la motion. Mais, ce n’était pas la
première fois que je voyais l’expérience du rejet d’une partie de l’église par une autre et
je demeure engagée dans cette Église avec tous ceux et celles appelés à aimer et à servir
le Seigneur Jésus-Christ. Comme je l’ai dit à mon groupe, «quand je me suis immergée
dans les eaux du Baptême, je n’ai pas négocié qui d’autre y serait avec moi».
Selon un passage de la lettre de St-Paul aux Ephésiens 4: 4-6
4 Il y a un seul corps et un seul Esprit, comme aussi vous avez été appelés à une
seule espérance par votre vocation; 5 il y a un seul Seigneur, une seule foi, un
seul baptême, 6 un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tous, et parmi
tous, et en tous.
La manière dont on se comporte comme disciple de Jésus-Christ revêt donc une très
grande importance. Je ne peux douter de la sincérité de toux ceux et celles présents, que
leur pensée ait été conforme à la mienne ou non. J’étais encore plus consciente de la
situation quand les médias se sont emparés de la nouvelle du lundi soir et une fois
encore le mardi soir, quand le Synode a pris fin. Quels types de témoins du Christ
aurons-nous été ?
J’ai cherché conseil auprès de mes soeurs et frères évêques et nous avons été encouragés
à écouter le chancelier de l’Église anglicane du Canada. Il est d’avis que le droit
canonique du mariage n’exclue pas explicitement le mariage entre personnes du même
sexe. Déjà, le diocèse de Montréal a autorisé la bénédiction chrétienne des mariages
civils de personnes de même sexe depuis le Synode du diocèse de 2008. Comme le droit
canonique au mariage du Synode général ne peut être changé qu’après sa seconde
lecture en 2019, je suis donc disposée à traiter chacun des cas individuellement, afin de
permettre au clergé qui m’en demande la permission, de célébrer le mariage chrétien de
personnes de même sexe. Je m’attends à ce que tous les couples qui seront mariés à
l’église reçoivent des appuis et une préparation au mariage. L’objectif du mariage
chrétien, tout comme pour les autres sacrements chrétiens, est d’approfondir
l’engagement et d’accroître la foi des personnes concernées. L’ensemble de l’église est
donc devant le défi d’être un témoin de l’Évangile de l’amour et de la grâce.
Que la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ abonde dans l’église.
Bien fidèlement,
La Très Révérende Mary Irwin-Gibson
Évêque de Montréal
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